Il sillonne les cieux depuis plus de quarante ans. Des déserts africains aux frontières orientales de l’Europe, le Mirage 2000 incarne une vision française de la supériorité aérienne. Derrière ses lignes acérées, une histoire d’innovation, de guerre et de diplomatie.
Le Mirage 2000 est plus qu’un avion de chasse : c’est un condensé de l’ingénierie militaire française. Depuis son entrée en service dans les années 1980, il a connu de nombreuses évolutions, été déployé sur des théâtres de guerre complexes, et récemment transféré à l’Ukraine en février 2025. Véritable outil stratégique, il reste une pièce maîtresse des relations militaires entre la France et ses alliés.
Mirage 2000 : un chasseur français devenu icône aérienne
Conçu par Dassault Aviation au milieu des années 1970, le Mirage 2000 devait initialement remplacer le Mirage III et offrir à l’armée française un intercepteur capable de répondre aux standards de l’époque. Le prototype effectue son premier vol en 1978, avant une entrée en service en 1984. Ce chasseur mono-réacteur à aile delta se distingue immédiatement par sa maniabilité et sa vitesse supersonique (Mach 2,2).
Plusieurs versions ont rapidement été développées depuis la fin des années 1970 par Dassault Aviation :
Le Mirage 2000C est la version de base, conçue pour la supériorité aérienne et entrée en service en 1984. Il est doté d’un radar RDI et principalement armé de missiles Super 530 et Magic 2. Son équivalent biplace pour la formation est le Mirage 2000B.
Viennent ensuite les versions spécialisées : le Mirage 2000N, destiné à la dissuasion nucléaire, est optimisé pour emporter le missile ASMP et doté d’un radar Antilope V ; il est conçu pour voler à très basse altitude et pénétrer les défenses ennemies.
Le Mirage 2000D, dérivé du 2000N, se spécialise dans l’appui sol avec des capacités de tir de précision en tout temps, notamment via les bombes guidées laser.
Enfin, le Mirage 2000-5, lancé dans les années 1990, marque une avancée majeure avec un radar RDY multitarget, un cockpit entièrement numérique et des missiles MICA capables d’engagements à longue distance, tout en étant compatible avec la navigation OTAN.
Sa variante française, le Mirage 2000-5F, reste en service en 2025 et se distingue comme la version la plus modernisée de la flotte, capable de missions d’interception, d’escorte, de défense aérienne et de projection rapide. La version Mirage 2000-5F, livrée à partir de 1999 à la France, se dote d’un radar RDY capable de détecter simultanément 24 cibles et d’en engager quatre via des missiles MICA. Sa technologie Fox 3 permet une phase terminale autonome du missile, réduisant la capacité de réaction de l’adversaire. Le cockpit numérique, le système de commandes HOTAS (Hands On Throttle And Stick), ainsi que ses contre-mesures électroniques renforcent la survivabilité de l’appareil.
Des théâtres multiples : du Sahel à la Syrie, la longue carrière opérationnelle du Mirage 2000
L’histoire opérationnelle du Mirage 2000 est riche et étendue. Dès les années 1990, il est engagé en Bosnie dans le cadre des opérations aériennes de l’OTAN. Il prend également part à l’opération Trident au Kosovo en 1999.
En 2011, le Mirage 2000 est de nouveau projeté, cette fois en Libye dans le cadre de l’opération Harmattan, qui participe à l’intervention internationale contre le régime de Kadhafi. Il y mène des frappes de précision aux côtés d’autres appareils français comme le Rafale.
En 2013, il est mobilisé dans l’opération Serval au Mali, puis dans Barkhane, pour lutter contre les groupes armés terroristes au Sahel. Ces missions de longue durée mettent en évidence sa capacité d’adaptation dans des contextes hostiles.
En 2018, dans le cadre de l’opération Hamilton, des Mirage 2000-5F interviennent en Syrie contre des sites liés à l’usage d’armes chimiques par le régime de Bachar el-Assad.
Depuis 2016, ils participent également à la protection de l’espace aérien européen dans le cadre de l’OTAN via des missions de Baltic Air Policing (BAP) et enhanced Air Policing (eAP).
En avril 2023, lors de l’opération Sagittaire, des Mirage 2000 basés à Djibouti appuient l’évacuation de ressortissants au Soudan. Peu après, ils sont engagés dans l’opération européenne Aspides, pour sécuriser la navigation commerciale dans le Golfe d’Aden.
L’Ukraine, nouvel horizon du Mirage 2000 : livraison officielle en février 202
Le 6 février 2025, la France annonce la livraison des premiers Mirage 2000-5F à l’Ukraine. Cette opération concrétise une promesse du président Emmanuel Macron, formulée lors des cérémonies du Débarquement en juin 2024. À cette occasion, il avait déclaré : « Demain, nous allons lancer une nouvelle coopération et annoncer le transfert de Mirage 2000-5 » (Le Monde).
Les appareils, modernisés pour l’occasion, incluent des capacités de combat air-sol, des systèmes de guerre électronique et seraient compatibles avec les missiles SCALP-EG. Pilotés par des aviateurs ukrainiens formés en France, ils viennent renforcer la défense aérienne ukrainienne, particulièrement autour de Kharkiv, cible récurrente des frappes russes.
Bien que le nombre exact d’avions livrés ne soit pas confirmé officiellement, des sources parlementaires françaises évoquent six appareils. Le ministre des Armées Sébastien Lecornu a précisé sur X que l’entrée en service opérationnel était prévue dès le premier trimestre 2025.
Un chasseur en transition, mais toujours stratégique
En 2025, la flotte française de Mirage 2000-5F compte 26 appareils. Basés à Luxeuil-les-Bains au sein de l’escadron GC 01.002 « Cigognes », ils continuent d’assurer des missions de dissuasion et de défense aérienne. Quatre d’entre eux sont stationnés à Djibouti dans le cadre d’un accord bilatéral.
Le Mirage 2000 est progressivement remplacé par le Rafale, mais son potentiel opérationnel reste intact. Sa structure allégée, son coût d’entretien modéré et sa robustesse en font un atout pour des pays partenaires.
Outre l’Ukraine, d’autres États ont acquis ou exploité le Mirage 2000 : la Grèce, le Qatar, Taïwan, les Émirats arabes unis et l’Inde, qui l’utilise encore dans son aviation de chasse, notamment dans la région du Cachemire.