L’attribution récente d’un important contrat de cybersécurité par l’État français au duo franco-canadien composé de CGI et Wavestone au détriment d’un consortium 100 % français a suscité un débat intense au sein de l’industrie et des cercles politiques. Ce contrat, destiné à sécuriser la majorité des ministères français, a révélé des tensions sous-jacentes entre la nécessité de protéger la souveraineté numérique du pays et la pression économique qui influence les décisions stratégiques.
Un appel d’offres déterminé par des critères économiques
Le contrat en question, doté d’un budget de 500 millions d’euros, visait à fournir des services de conseil, d’expertise et de formation en cybersécurité pour une période de quatre ans, à l’exception du ministère des Armées. Le ministère de l’Agriculture, chargé de trancher parmi les postulants, a finalement retenu le duo CGI-Wavestone, qui proposait une offre « économiquement la plus avantageuse ». En effet, le prix proposé par ce duo était 30 % inférieur à celui des concurrents, un écart significatif qui a pesé lourdement dans la balance.
Ce choix a immédiatement soulevé des questions sur la pertinence de privilégier une solution moins coûteuse au détriment d’une option exclusivement française, surtout dans un domaine aussi stratégique que la cybersécurité. Cette décision pourrait affaiblir la position des acteurs français sur la scène internationale et nuire à leur capacité à attirer des investissements.
Une occasion manquée pour la souveraineté numérique française
La décision de confier la cybersécurité des ministères à une entité en partie étrangère intervient à un moment où la souveraineté numérique est devenue une priorité nationale. Le gouvernement français avait pourtant affiché son ambition de faire de la France un leader mondial en matière de cybersécurité, notamment à travers le plan « France 2030 » et la « stratégie nationale d’accélération pour la cybersécurité ». Ces initiatives visaient à renforcer l’écosystème français en s’appuyant sur des acteurs locaux, tels que ceux regroupés au sein du Campus Cyber, un hub créé en 2022 pour promouvoir l’expertise française.
Cependant, malgré leur proximité avec les institutions françaises et le soutien du président du Campus Cyber, Michel Van Den Berghe, le consortium franco-français formé par Capgemini, Thales, Atos et HeadMind Partners n’a pas su convaincre. Bien que leur candidature ait été jugée « techniquement cohérente », elle n’a pas pu rivaliser avec les conditions économiques plus favorables offertes par CGI et Wavestone.
Conséquences et perspectives pour l’avenir de la cybersécurité en France
Les répercussions de cette décision pourraient être significatives pour l’écosystème de cybersécurité en France. Plusieurs experts craignent que la préférence accordée à un consortium non entièrement français ne compromette les efforts visant à développer des solutions souveraines et innovantes dans ce secteur crucial. De plus, cette situation pourrait décourager les entreprises locales, qui voient dans les marchés publics un levier essentiel pour leur croissance et leur compétitivité à l’échelle mondiale.
Dans ce contexte, il est crucial que les entreprises françaises continuent d’innover et de renforcer leur position sur le marché, en dépit des défis posés par une concurrence internationale féroce. Le soutien du gouvernement, à travers des initiatives comme Bpifrance, reste indispensable pour permettre à ces acteurs de se développer et de s’affirmer sur la scène internationale.