L’Europe dépend trop de ses alliés dans le secteur de la défense, conclusion d’un rapport qui vient juste d’être remis à Bruxelles. Les multiples commandes en la matière aux États-Unis sont notamment pointées du doigt.
L’Europe est trop dépendante de ses alliés pour ses équipements de défense
Selon un rapport rédigé par Mario Draghi, ancien Premier ministre italien et ex-président de la Banque centrale européenne, 63 % des commandes d’équipements de défense passées entre mi-2022 et mi-2023 dans l’Union européenne sont attribuées à des entreprises américaines. Ce chiffre révèle la dépendance disproportionnée de l’UE vis-à-vis des États-Unis, un partenaire certes stratégique, mais qui devient source de fragilité pour l’autonomie de défense européenne. L’une des causes majeures de cette dépendance est le faible niveau d’investissement dans la recherche et développement en matière de défense sur le Vieux-Continent. Selon le même rapport, l’UE n’a consacré que 10,7 milliards d’euros à la recherche dans ce secteur en 2022, soit 4,5 % de ses dépenses totales de défense.
En comparaison, les États-Unis ont investi 140 milliards de dollars, soit 16 % de leur budget de défense. Par ailleurs, ce manque d’investissement n’est pas seulement un problème de chiffres. Il reflète également une fragmentation industrielle, où chaque pays européen tend à privilégier ses propres entreprises nationales, souvent au détriment d’une collaboration globale. Par exemple, la fourniture d’artillerie à l’Ukraine a mis en évidence cette incohérence : plusieurs types d’obusiers et d’obus de 155 mm ont été envoyés, créant des complications logistiques et une inefficacité sur le terrain.
Les défis pour une industrie de défense européenne intégrée
Malgré les efforts entrepris ces dernières années pour renforcer l’intégration des capacités industrielles en matière de défense, notamment via des projets tels que l’avion de transport polyvalent A-330 Multi-Role Tanker, les avancées restent limitées. Ce projet conjoint a montré qu’il est possible de mutualiser les ressources et de partager les coûts d’exploitation et de maintenance. Cependant, de telles initiatives restent encore rares.
Les États membres de l’UE sont confrontés à des obstacles politiques qui freinent une véritable intégration de cette industrie. Chaque pays préfère encore protéger ses propres entreprises et son autonomie industrielle. Ce choix est également influencé par la volonté de certains États de ne pas perdre d’influence dans la définition de leurs priorités en matière de défense. Les responsables européens, tout comme les dirigeants de l’OTAN, rappellent depuis des années l’importance d’augmenter les budgets en la matière. Les États membres de l’OTAN se sont engagés à allouer au moins 2 % de leur PIB à la défense, une promesse que peu d’États respectaient jusqu’à récemment. Cependant, malgré cette augmentation des budgets, une grande partie de cet argent continue de bénéficier à l’industrie américaine.